Mission Grèce

Jour de fête à IDOMENI – 21 mars 2016

Aujourd’hui est un jour spécial pour la plupart des habitants d’Idomeni : Newroz est la fête la plus importante pour les Kurdes, à la fois nouvel an et fête du printemps, mais aussi du renouveau. Pour les Arabes du moyen-orient, c’est le jour de la fête des mères. Les célébrations ont déjà commencé hier soir dans tous les camps, avec de grands rassemblements et festivités autour de grands feux.

Mais la journée commence par la découverte d’un nouvel aspect de l’accueil grec des réfugiés, les camps militaires. Céline, chef de terrain de « Save thé Children », nous reçoit chaleureusement et promet un futur solidaire entre « Save » et CMSF. C’est elle-même qui nous propose de nous aider à accéder à ces fameux « camps militaires » de Nea Kavala et Cherso, qui sont des camps extrêmement hermétiques, dont personne ne connaît grand-chose, si ce n’est les photos aériennes diffusés sur le site de l’armée grecque.

Nous avions l’intention de réussir à amener un peu de légèreté dans ces endroits qui paraissent, encore plus que les autres, des prisons à ciel ouvert, et grâce à Céline les portes vont peut-être s’ouvrir. Nous partons avec elle visiter le camp de Cherso, perdu au milieu de rien, où vivent 4000 personnes, dont 2000 enfants, dans des tentes alignées en rangs. Les militaires nous reçoivent plus que froidement, notre visite ne peut se faire qu’avec un garde qui vérifie tous nos mouvements, et surtout que nous ne prenons pas de photos. Les enfants que nous croisons semblent avides du moindre jeu que nous leur proposons, et même si nous n’avons pas encore d’autorisation sûre, nous nous promettons de revenir pour eux !

Notre arrivée à Idomeni ne passe pas inaperçue, car nous débarquons déjà costumés, et à peine sortis de la voiture nous avons déjà un cercle qui se forme et des danses sur la route ! Nous demandons notre chemin : « C’est où Newroz ? » Les clowns veulent fêter aussi ! S’ensuit une longue déambulation, le cortège des enfants grandissant de plus en plus, chacun nous indiquant un chemin différent. Nous longeons une file d’attente de distribution de repas, et c’est l’occasion d’allumer les sourires un par un, jouant avec chacun, quel que soit son âge ou son état.

« La fanfare la plus petite du monde » (un trombone et un bidon !), accompagnée par les trompes de plastique des enfants, avance les long de la zone C, égayant tous les passants, jusqu’à… tomber nez à nez avec une manifestation silencieuse en face de rangs de policiers !

Nous comprenons alors qu’il s’agit de l’aboutissement des grandes manifestations qui ont eu lieu cet après-midi, dont on a entendu parler, et peut-être même que les trompes des enfants sont les restes de la manifestations. On nous fait de grands signes, et nous comprenons qu’il nous faut rebrousser chemin, cette fois-ci en faisant de grands « chhhht » avec les enfants, faisant des marches au ralenti ! Et nous savons aussi que, d’une certaine manière, nous avons sous notre responsabilité cette horde de petits et il nous paraît plus sage de les éloigner du centre des conflits.

D’une façon, nous renonçons à notre fête de Newroz, mais la fête n’est pas finie, et les enfants ne nous lâcheront pas de sitôt ! C’est parti pour des jeux de voix, des courses, des danses, et c’est exténués que nous faisons le chemin inverse, disant au revoir aux enfants un par un. Sur la route, Flamboia rencontre Fatima, une mère qui lui explique la fête d’aujourd’hui, qui est pour elle la fête des mères, et parle de ses 4 enfants, de son plus grand (13 ans) qui est déjà en Allemagne, tout seul avec son cousin de 14 ans.

« Qu’est ce que je pouvais faire ? En Syrie il n’y avait plus rien, c’était la seule chose à faire. »

Elle nous invite à visiter sa famille, et c’est une dernière fête autour du feu que nous partageons, apprenant des danses sur les musiques des portables, répétant des expressions en arabe, riant tous ensemble de pas grand-chose souvent !

Une dernière musique et les clowns repartent, sillonnant le camp de nuit, enrobés de l’air irrespirable du crépuscule, l’air des feux qui s’allument de partout et qui brûlent tout ce qu’ils trouvent…

Demain nous passerons, demain nous reviendrons pour jouer de l’autre côté d’Idomeni !