Suite au flux des migrants qui ne cesse de s’accroître, la situation des réfugiés de Calais est de plus en plus critique depuis ces derniers mois. Elle est plus qu’urgente. Elle est scandaleuse dans l’indifférence politique, dramatique dans les conditions de vie et d’une tristesse infinie dans les perspectives d’avenir pour ces milliers d’humains.

Clowns Sans Frontières France, qui intervient dans la région depuis 2011, décide de lancer la première mission internationale entre sections de Clowns sans Frontières : France, Belgique et Angleterre répondent présents au rendez-vous. 8 clowns remplis d’énergie et de fantaisies partent à la rencontre des réfugiés de Calais et des environs, tels que Grande Synthe et Tatinghem (à ne pas confondre avec le camp de Téteghem qui a été démantelé il y a 3 semaines).

Nous découvrons la réalité du quotidien des réfugiés par les témoignages des compagnons d’Emmaüs qui nous hébergent chaleureusement. A 700 m à vol d’oiseau de notre logement se trouve le camp de Grande Synthe. Un camp qui, d’après Bernard (compagnon d’Emmaus),  était occupé par 80 migrants en juin dernier et aujourd’hui par 3000.

Situé entre deux autoroutes principales où passent les camions en direction de l’Angleterre, ce camp constitue un endroit stratégique pour effectuer des tentatives de passages de l’autre côté de la Manche. Les nuits sont épuisantes pour ces Afghans, Syriens, Irakiens, Erythréens, Iraniens  et bien d’autres qui cherchent une terre de paix et d’accueil. En matinée ils se reposent et comme la luminosité en cette période de l’année est limitée, pour le moment nous intervenons une fois par jour.

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CadrésAffichage de image.png en cours... par Médecins du Monde, nous rejoignons le camp de Tatinghem (à 35 km d’où nous logeons) pour effectuer notre première intervention. Il ne nous est pas permis de rentrer sur le camp lui-même, situé dans un fossé au bout d’un chemin de terre entre deux champs, sans eau ni électricité. Une trentaine d’hommes de 18 à 60 ans attendent leur consultation médicale devant la camionnette de Médecins du Monde qui va se transformer en fond de scène. Avec humour, absurde, ridicule et enthousiasme, nous tentons de décrocher sourires et étincelles dans les regards de ces lourds vécus. Un chant lyrique accompagné d’accordéon nous permet de valser en leur compagnie. Les rires arrivent au moment où Joey, notre fabuleuse clown anglaise, met une couronne sur sa tête et empêche tout le monde de rentrer sur le territoire qu’elle s’est délimité à l’aide d’une bâche.

Après diversion, nous rentrons sur ce territoire fictif où elle demandera un passeport à chacun. Un jeu participatif autour d’un même passeport qui se passe de main en main avec la même grimace de gros poisson qui louche permettra de détendre l’atmosphère et d’arriver à une fête musicale où trombones, flûte traversière, accordéon et percussions interpréteront quelques morceaux de notre tendre fanfare CSF belge. Oh mais où est passé l’accordéon ????

Un monsieur d’une soixantaine d’années, venu récemment d’Azerbaïdjan, nous joue quelques notes avant que nous les laissions boire leur thé autour d’un feu de bois protégé par l’ensemble de leurs dos.

La barrière de la langue ne nous a pas permis de partager leur histoire de façon verbale, mais elle se lisait dans leurs regards, et ces mêmes regards nous ont permis de découvrir les enfants qu’ils avaient été, et les grands enfants qu’ils resteront.

Brigitte, volontaire de longue date auprès des migrants, qui nous accompagnait aujourd’hui pour Médecins du Monde, nous disait avec gaieté :

« Ma deuxième famille, mes grands enfants »